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25 janvier 2011 2 25 /01 /janvier /2011 16:43

Une nuit où j'étais seule (20)

 

 

Elle l’avait fait. Je n’arrivais pas à le croire. Cela ne devait pourtant pas m’étonner. Samantha était d’une nature impulsive que rien ni personne ne pouvait brimer, mais j’avais eu l’espoir fou qu’elle ne se précipiterait pas chez Richard en sortant de chez mon frère. Mais elle l’avait fait. Je le savais grâce aux coups de fil de mon ex fiancé auxquels je n’avais d’ailleurs pas répondu de peur d’être une fois de plus insultée. Samantha faisait, elle aussi, la sourde oreille à mes appels. C’était tout elle ça, de faire un esclandre au nom de notre amitié et de se cacher par la suite. J’étais tellement en colère contre elle que certains jours, une envie folle de prendre ma voiture pour rentrer à Manchester me prenait. Dans ces moments-là, seul le tendre sourire de mon neveu arrivait à me calmer. Steven aussi m’évitait. Il était furieux contre moi d’avoir tout raconter à son épouse. Parfois, je me disais qu’on agissait tous comme des gamins à se faire la tête ainsi, mais cela semblait plus fort que nous.

_ Tante Pamela, tu seras encore à la maison pour le spectacle de Noël ? me demanda Brian plein d’espoir.

Le mois de décembre venait à peine de commencer et son spectacle aurait lieu dans une semaine et demie. Je le regardai espiègle, songeant déjà à lui faire croire que je ne serai pas là, mais mon cœur tomba quand je vis ses grands yeux, aussi bleu que les miens, me suppliaient.

_ Je vais rester ici assez longtemps, non seulement pour voir ton spectacle, mais aussi pour passer les vacances avec toi.

Avant même que j’eu terminé ma phrase, Brian se jetait dans mes bras en hurlant de joie.

_ Quelle plaie ! entendis-je rouspéter dans mon dos.

Je me retournai lentement, de peur de croiser le regard lourd de reproches de mon frère, mais je ne croisai que des yeux souriant. Steven me fit un clin d’œil et je sus tout de suite qu’il n’était plus fâché. Dieu merci, mon frère ne connaissait pas la rancœur !

_ Alex ! cria-t-il tout en me fixant. Viens là, j’ai une bonne nouvelle ! Ma petite sœur se propose gentiment de garder notre fils pendant notre séjour à la montagne, n’est-ce pas généreux de sa part ? On n’aura pas besoin de louer les services  d’une nounou !

Je sursautai à cette nouvelle. Mon frère était vraiment sans gêne.

_ Ne nous regarde pas avec ces yeux là, Pam ! me dit gentiment ma belle-sœur. Il va de soi que tu viens avec nous. Il est hors de question que je laisse mon fils derrière moi pendant que je vais m’amuser à la neige.

Je poussai un soupir de soulagement. Je ne me voyais pas m’occupant seule de Brian. J’avais beau l’adoré, jusqu’à présent je ne passais pas plus de vingt minutes avec lui sans la présence d’un autre adulte. J’aimais bien jouer les tantes drôles et taquines, mais les nounous attentionnées ce n’était pas dans mon caractère. Je n’étais déjà pas capable de m’occuper de moi alors d’un autre, et en plus d’un enfant, cela me paressait insurmontable.

_ Youpi ! s’écria Brian pendant que mon cœur reprenait un rythme normal. On va à la neige ! On va à la neige ! On va à la neige ! Dis, tante Pamela, tu feras de la luge avec moi ? Dis oui ! Dis oui, s’il-te-plaît !

_ Arrête d’embêter ta tante ou elle va refuser de nous suivre ! le gronda gentiment son père. Et arrête aussi de t’inquiéter ! Elle s’occupera de toi pendant que je m’occuperai de ta mère.

Le clin d’œil complice qu’il adressa à Alexandrine la fit rougir jusqu’à la racine des cheveux. Mon frère, lui, se mit à rire devant son air timide. Moi, j’étais heureuse de les voir si amoureux. S’il y avait bien un couple que j’enviais sans réellement me l’avouer, c’était bien eux. Alex et Steven étaient tombés fous amoureux l’un de l’autre alors que mon frère avait dix-sept ans et mon amie quatorze ans. Ils ne s’étaient pas avoué leur amour tout de suite à cause de leur différence d’âge. Alexandrine me racontait souvent que mon imbécile de frère l’avait ignoré pendant toute une année à cause des moqueries de ses amis. Ils estimaient qu’elle était trop jeune pour lui et aussi pas assez belle. Mon Alexandrine pas assez jolie ? N’importe quoi ! Tout ça pour quelques kilos en trop qu’elle avait toujours. Certes, mon amie était ronde, mais ses rondeurs étaient justes là où il le fallait. Cela la rendait encore plus féminine et plus sexy. Quand elle me racontait leur histoire, je ne manquais jamais d’éclater de rire. C’est fou ce que l’amour pouvait rendre un homme niais. Il s’évertuait à l’éviter jusqu’au jour où la timide Alexandrine lui était sauté dessus derrière le gymnase du lycée. Il venait d’obtenir son diplôme et elle craignait tant de ne plus jamais le revoir qu’elle avait profité de ce moment d’intimité pour lui avouer son amour. Comme il n’avait eu aucune réaction, elle en avait profité pour l’embrasser. Le plus marrant, c’est qu’il s’était enfui comme s’il avait été tenté par le diable en personne. Il était réapparu deux mois plus tard et ils commencèrent à sortir ensemble. Depuis maintenant sept ans, ils étaient inséparables et toujours aussi amoureux.

Détournant mon regard attendri sur le joli couple qu’ils formaient, j’allai ouvrir à l’impromptu qui osait nous déranger à un moment pareil. En reconnaissant la haute silhouette qui se tenait face à moi, sur le seuil de mon frère, je crus défaillir.

_ Ca fait plaisir de te voir ! s’exclama mon ex fiancé en m’embrassant le plus naturellement du monde.

Il me bouscula légèrement afin de pouvoir entrer et referma derrière lui.

_ Il fait un froid de canard dehors ! Heureusement que ton frère ne lésine pas sur le chauffage. Où est-il celui là ?

Des éclats de rire venant du salon lui répondirent. Moi, je restai sans voix, toujours plantée devant la porte d’entrée.je regardais Richard enlevait consciencieusement ses gants de cuir noir et son manteau écossai couleur anthracite. Aujourd’hui, il ne portait pas l’un de ses éternels costumes, mais un pantalon prince de Galles gris que venait relevait un polo de la même couleur de ses yeux, bleu clair. Ses cheveux châtain clair étaient rendu plus sombre par les flocons de neige qu’il n’avait pu éviter en venant ici. J’étais comme hypnotisée par cette image toute décontractée de mon fiancé. Il était encore plus élégant qu’en costume ou en smoking.

_ Qu’est-ce… qu’est-ce que tu fais là ? arrivai-je enfin à lui demander en sortant de ma surprise.

_ Je suis venue te chercher et te ramener à la maison, me dit-il d’une voix trop confiante à mon goût.

Son sourire arrogant acheva de me rendre furieuse. J’ouvrai à nouveau la porte et lui signifiai de partir.

_ Pas sans toi, mon cœur, me dit-il en m’enlaçant.

Je tentai vainement de m’écarter de lui. Il me tenait étroitement contre lui, le nez dans mes cheveux.

_ C’est fou ce que tu as pu me manquer ! Il a fallu l’intrusion en fanfare de Samantha dans mon bureau pour me rappeler que ma vie n’avait aucun sens sans toi.

Le repoussant de toutes mes forces, j’arrivai enfin à me dégager de son étreinte. Je m’éloignai de plusieurs pas, tentée d’appeler mon frère pour qu’il mette Richard à la porte. La vu de son visage satisfait me mettait hors de moi.

_ Et il t’a fallu pratiquement deux semaines pour t’en rendre compte !

Mon ton sarcastique le fit grimacer.

_ J’avoue que ma colère m’a aveuglé, mais je t’aime toujours. J’ai beau savoir que tu m’as trompé, je ne peux m’empêcher de te vouloir toujours pour femme.

_ Je ne t’ai jamais trompé, lui murmurai-je las de répéter encore et encore la même chose.

_ OK ! Tu as embrassé un autre homme, mais c’est normal. C’est ce qu’on appelle l’angoisse du mariage. Je sais que tu as amèrement regretté ce que tu as fait et je suis tout disposé à te pardonner.

_ Mais je n’ai rien à me faire pardonner, murmurai-je en reculant encore.

_ OK, Pam ! N’en parlons plus ! Viens plutôt ici que je t’embrasse.

_ Je vous déconseille de poser vos sales pattes sur ma sœur.

Richard sursauta comme moi en entendant la voix de Steven. Il se retourna pour lui faire face avec un sourire sarcastique.

_J’avais oublié le grand frère protecteur. Comment allez-vous, mon cher beau-frère ? Je vous remercie de vous être occupé de ma fiancée pendant tout ce temps, mais je suis ici pour la ramener à la maison. Nous avons eu une petite dispute et ce n’est pas en se terrant ici que nous allons pouvoir régler nos problèmes.

_ Pamela est libre de partir quand elle veut, mais pas plus tard qu’il y a cinq minutes, elle m’annonçait vouloir prolonger son séjours jusqu’aux fêtes de fin d’année.

Richard tourna un regard courroucé vers moi. J’en tressaillis, et ce bien malgré moi.

_ C’est impossible, mon cœur, me susurra-t-il. Nous devions passer les fêtes en amoureux en Hongrie.

Il s’avança vers moi pour me prendre tendrement les mains.

_ Tu ne vas quand même pas foutre en l’aire notre avenir par bêtise. J’admets avoir aussi mes torts dans cette situation, mais ma stupidité, mon erreur ne doit pas tout remettre en cause.

Je reconnaissais bien là le talent d’orateur de mon avocat de fiancée. Il avait presque failli me convaincre, mais l’image de sa violence envers moi me remit les idées en place. Je dégageai mes mains des siennes et reculai jusqu’à me retrouver tout contre le torse de Steven.

_ Je pense que vous avez votre réponse, Richard. Je ne vous montre pas la sortie.

Mon frère tremblait de colère retenue. J’étais consciente de la maîtrise dont il faisait preuve pour ne pas sauter à la tête du jeune magistrat.

Richard ne me quittait pas des yeux. Leur couleur avait changé, devenant presqu’aussi bleu que les miens. Je compris qu’il était aussi en colère. Il serra les poings, tendant au maximum ses muscles, avant de tourner les talons et d’ouvrir la porte. Dans le vent glacial, il se tourna et tout en me fixant dit : « Ne crois pas qu’on en restera là, Pam. Tu ne pourras pas te cacher ici indéfiniment et tu finiras par me céder, comme d’habitude. Rien n’est fini entre nous, je ne le permettrai jamais. »

 

Une nuit où j'étais seule (22)

 

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