_ Tu sais bien qu'il n'y a pas de place pour un homme dans ma vie, lui répliquai-je une fois calmée.
_ C'est bien dommage ! Il y a aujourd'hui des pompiers d'une beauté à couper le souffle dans le lycée. Ils sont venus pour un stage de PSC1 auprès de nos classes de terminales. Tant pis, ils seront tous pour moi.
À cette annonce, je lui lançai un clin d'œil.
_ Et Éric dans tout ça ? C'est déjà fini ?
Le sourire qui illuminait son visage à l'instant, s'effaça et ses jolis yeux noisettes s'assombrirent.
_ Il m'a quittée, hier matin, dit-elle laconique.
_ Oh ! Je suis désolée Pauline.
_ Il ne faut pas. Ça ne fonctionnait pas nous deux. Le problème c'est qu'il a fallu qu'il me quitte pour que je m'en rende compte. J'ai encore perdu deux mois de ma vie dans une histoire qui n'en valait pas la peine.
Avec un sourire, elle détourna les yeux et mangea machinalement sa salade de carotte.
Moi, je lâchais un soupir d'exaspération. Pauline a beau être une amie géniale, une femme formidable, elle a toujours le chic pour s'embrigader dans des histoires d'amours sans lendemain.
_ Franchement, t'aurais pu faire un effort pour t'habiller aujourd'hui ! s'exclama-t-elle sans crier garde, me faisant sursauter par la même occasion.
Je la regardai avec un sourire penaud et regardai mon éternel jean délavé et mon haut noir difforme avec étonnement.
_ C'est pourtant ce que j'ai trouvé de plus sexy et chic à la fois dans mon armoire ce matin, plaisantai-je à moitié.
_ Moi qui avais espéré te caser avec l'un de ses soldats du feu que j'ai vu aujourd'hui, mais avec cette tenue, c'est peine perdue.
Mon amie m'étonnera toujours avec sa détermination à faire de moi une jeune femme comme les autres. Elle connait, pourtant, mieux que quiconque, mon aversion pour la gente masculine. Elle sait bien que mes rapports avec les hommes sont teintés de conflit et de malentendu. Pour moi, l'amour ne vaut pas la peine d'être vécu. L'amour avec un grand A n'existe pas.
_ Ne te retourne pas ! Voilà justement celui qui m'a fait fondre ce matin, déclara mon amie d'une voix enjouée. Il serait parfait... Oh, mon Dieu ! Il vient vers nous. Promets-moi de faire preuve d'amabilité pour une fois, Angie.
Je haussai les épaules, boudeuse.
Pauline a tendance à me traiter comme une gamine et j'en ai une sainte horreur. Après tout, c'est elle qui oublie son âge dès qu'un homme pointe le bout de son nez. La preuve, le rouge qui monta à ses joues tandis qu'elle parlait de ce pompier qui ne valait pas tripette j'en étais sûre.
Obnubilée par l'inconnu, la jeune femme ne remarqua même pas mon changement d'humeur. Non. Comme une adolescente ayant ses hormones en ébullition, elle lissa ses longs cheveux auburn d'un geste maladroit, s'humecta les lèvres avant d'y plaquer son sourire le plus aguicheur.
Dommage, mon amie a tendance à toujours trop en faire, pourtant c'est une jolie femme. Les hommes la remarquent toujours malgré le trop plein de maquillage et surtout à cause de ses tenues ultra courtes et moulantes.
_ Bonjour, Angelina !
Au son de cette voix masculine bien trop familière, je fermai furieusement les yeux. À ce moment-là, j'eus le fol espoir qu'il s'agissait d'un mauvais rêve. Ce ne pouvait pas être sa voix. Pas ici. Pas dans mon monde si tranquille.
Lentement, je me retournai, retenant ma respiration. Avec un soupir de résignation, je me rendis compte que je me trouvais pour la deuxième fois en deux semaines face à Grégory BRAGA.
